J’ai vu le jour en l’an 140 avant Jésus Christ, c’est-à-dire 6 ans après la domination romaine en Grèce, bien que la présence des romains sur ce territoire fût déjà forte bien avant cela. Mon père était l’un de ces conquérants Romains, il avait pris possession d’une grande cité grecque imposant sa présence et celle de ses hommes pour décimer la puissance grecque s’y trouvant. Il était sans pitié et donc fût sans merci lorsque la populace tenta de se révolter contre son influence et l’empire qu’il leur imposait quelques années avant ma naissance. Il instaura un régime basé sur la terreur et la crainte, il aimait cela, que les faibles, les inférieurs le craigne lui et sa puissance. Il a toujours aimé cela, le pouvoir, l’importance, être au sommet et régner. Il était dur et froid avec son peuple voulant toujours plus que ce qu’il n’avait et n’ayant peur de rien n’y personne. Quelque peu trop sûr de lui sûrement…

Ma mère quant à elle n’avait rien à voir avec lui, elle était faible et l’on ne la remarquait presque jamais. Bien plus jeune que lui elle le craignait tout autant. Il ne voyait en elle que l’intérêt d’avoir un jour un héritier et faillit la maudire tant elle mit du temps à lui en donner un. Il était violent même à son égard et le fut jusqu’à ce qu’enfin elle enfante de jumeaux. Heureusement pour lui, mais surtout pour elle, parmi ces deux nouveau-nés y avait un garçon, un héritier enfin. J’étais né aux côtés de ma jumelle, Elya.

Notre enfance fut très basique et porte très peu d’intérêt à notre histoire mais nous allons tout de même nous attarder sur quelques renseignements qui pourraient avoir un infime intérêt. Comme nous étions encore jeunes notre père ne nous prêtait guère grande attention comme nous n’étions pas encore aptes à ce que l’on nous enseigne quoique ce soit. Je passais donc la majorité de mon temps aux côtés de ma sœur et de nos précepteurs et nourrices, notre mère refusant de nous prendre en charge, préférant faire ce qu’elle avait toujours faire à la perfection, ne servir à rien d’autre qu’à faire acte de présence sans dire mot ou ne faire la moindre chose, se contentant d’obéir à son mari ou à s’enfermer dans ses appartements.

Nous fîmes rapidement la connaissance de notre cousine, de quelques années plus âgée que nous, Enna et de son frère, qui lui avait le même âge que nous, Seter. Leurs parents étaient installés dans la demeure impériale de notre paternel comme son frère, notre oncle, était son bras droit. Nous fûmes élevés tous ensemble pendant nos jeunes années et étions donc tous quatre inséparables.  Déjà très jeunes nous fûmes élevés dans l’optique d’être des puissants, tous autant les uns que les autres, nos sœurs comme futurs épouses de puissants, nous comme futurs leaders. Nos anciens faisaient donc en sorte de nous montrer comment les esclaves, la populace et même les aristocrates se devaient d’être traités, que nous n’avions rien à voir avec eux, que nous étions des puissants supérieurs à ces misérables, nous apprenants à reconnaître la puissance d’autrui seulement lorsqu’elle s’élevait à un niveau similaire à la nôtre et encore nous disant de rester sur nos gardes face à ces autres puissances. Nos seuls alliés étaient donc nous-mêmes. Nous apprenant même à nous méfier de nos proches, mais nous savions qu’il nous était impossible de nous trahir entre nous quatre, nos futurs allaient nous le prouver.  

Pour notre oncle, tout comme notre père, les liens du sang, de leur sang, qu’ils considéraient comme pur et dédié à la royauté, étaient primordiaux. Voilà pourquoi déjà très jeune Enna m’était promise afin que nous perpétuons leur ligné dans la force et la terreur, tel que le faisaient déjà nos pères, que nous en serions que plus puissants... Ils n’avaient pas tort sur ce point bien que nous allions voir les choses légèrement différemment qu’eux. Nos pères ne voyaient donc en nos sœurs que l’intérêt d’être mariées et en nous l’intérêt d’être forgé à leur image, Seter en tant que futur bras droit et conseiller, moi en tant que futur puissant. Et ce fut à nos sept ans que la patience de nos pères fut récompensée. Ils purent enfin nous prendre avec eux pour nous enseigner ce qu’ils désiraient, à notre instar comme nous passions par conséquent bien moins de temps aux côtés de nos sœurs avec lesquelles nous étions très proches, seules autres enfants que nous avions le droit de côtoyer.  

Nos journées étaient emplies de nouvelles connaissances et de nouvelles leçons. Mais même au cour de cet apprentissage je passais que très peu de temps aux côtés de Seter. Mon père m’abrutissait de nouvelles informations tous les jours, me contant les milles et unes histoires du royaume, se présentant continuellement comme celui à qui était dû, mettant même au second plan les faits de mon oncle, son égoïsme prenant le dessus de chacun de ses récits et me fatiguant chaque jour un peu plus. Voilà bien une des premières choses que je ne désirais par hériter de lui. Cet égoïsme. Je savais que pour ma part je saurais toujours rendre le mérite que méritait Seter ou encore nos sœurs. Comment pourrions-nous devenir tous les quatre plus puissants si nous ne nous voyions pas au même niveau ? Car c’était bel et bien ce que nous souhaitions, nous élever tous quatre ensembles. Mais je ne laissais rien paraître à mon part, l’ayant suffisamment observé pour savoir que si j’osais lui faire part de mes futurs plans différents de ce qu’il avait en tête alors il se vengerait sur moi certes, mais surtout sur les trois seules personnes auxquelles je tenais. Je le laissais donc se bercer d’illusions, retenant de ce qu’il me disait les seules informations qui me semblaient réellement utiles ou intéressantes pour mon futur. Je faisais semblant d’afficher une tête intéressée à l’écoute de ce qu’il prévoyait pour son empire, pour ses sujets, ses ennemis, ses alliés, comment se faire détester mais surtout craindre un peu plus.

Je passais donc moins de temps en présence d’Elya, Enna et Seter à mon grand regret, mais nous savions passer outre la surveillance de nos pères respectifs ou encore de nos autres précepteurs pour nous retrouver durant les nuits. Nous mettions alors au courant nos sœurs de ce que nous avions appris, ce que nous trouvions ridicule dans les dires de nos pères, critiquant certaines de leurs méthodes, en envisageant de nouvelles plus drastiques et stricts. Mettant en commun les connaissances de Seter et les miennes, enseignant à notre tour à nos sœurs, car bien que nos parents les pensent inaptes à tant de savoir nous étions persuadé du contraire et savions qu’il nous serait possible d’aller bien plus loin si nous étions tous au même point. Nous avions une relation très forte et fusionnelle mais à notre manière. Nous nous aimions mais ne l’affichions que très peu, ne faisant que très rarement voire jamais part de ce que l’on ressentait les uns pour les autres. Nous éprouvions les uns pour les autres un respect sans pareil, respect que nous n’accordions même pas à nos parents aux vus de leur manière d’être avec nous, de nous voir tels des objets, des marionnettes et nous séparant sans même s’inquiétait de notre ressenti. Nous voulions prendre leur place rapidement, ayant nous aussi l’envie de la puissance, de la force, voyant encore plus loin que les projets de nos paternels, mais ne désirant pas que seul l’un de nous ne s’élève, préférant le faire tous ensemble et prouver ce dont nous étions capables. Oui, nous avions nombres de projets, de désirs et d’envies, mais savions les cacher, les mettre de côté pour mieux les dévoiler en temps voulu, lorsque nous serions nous-mêmes suffisamment puissants pour que rien ne nous arrête.

Nous n’avions rien de similaire aux autres enfants, nous avions été élevés de manière à être aussi froid que la glace et aussi dur que la roche. Des enfants encore jeunes mais déjà impardonnables, ne pleurant jamais, subissant sans plaintes ni pleurs sachant que cette période n’était qu’une étape nécessaire à notre futur bien plus attrayant. Voilà pourquoi nous ne faisions jamais part de l’affection que nous avions tous les uns pour les autres, voyant l’affection comme une faiblesse qui bloquerait notre désir de plus de force, nous accordant sur ce fait et sachant que nous n’avions pas besoin de nous en faire part pour le savoir. Nous grandîmes ainsi, en apparence de simples enfants durs et froids envers ce qui leur étaient inférieur, voire même entre eux, alors qu’en secret nous étions plus liés que jamais. Nous contentant d’apprendre, d’encaisser les critiques et les coups lorsque ceux-ci fusaient comme notre âge ne nous permettait pas d’apprendre et de retenir aussi rapidement que le désiraient nos pères. Retenant l’essentiel en vue de notre future montée au pouvoir… Montée qui allait être bien plus rapide que nous l’espérions.

Alors que nous avions passé le cap de nos onze années de vie notre mère décéda. Cela nous affecta que très peu, elle avait toujours été très faible et nous ne partagions que très peu avec elle. Il y eut beaucoup de choses dites sur sa mort, certaines expliquant qu’elle s’était elle-même donnée la mort, d’autres qu’elle avait été empoisonnée ou encore qu’elle avait succombé à un mal inconnu. Mais ce que nous savions était que cela était le fait de notre père. Elya et moi le savions impitoyable et violent, nous savions qu’il devait plus d’une fois passer ses nerfs et envie sur celle qui nous avait mis au monde et nous le connaissions suffisamment pour savoir qu’il ne supporterait pas la faiblesse de cette femme. Nous étions presque surpris qu’elle ait survécu aussi longtemps… Aussi bien nous ne nous étonnions pas de sa mort, mais une seule question trottait dans nos esprits, maintenant que son souffre-douleur favori n’était plus, sur qui passerait-il ses humeurs ?

Chacun d’entre nous avait déjà reçu des coups de sa part, mais nous les savions minimes comparé à ce qu’il faisait subir à notre mère. Ce fut lorsqu’un soir on se retrouva comme à notre habitude que l’on remarqua le retard puis l’absence d’Elya. Ce ne fut que le lendemain soir qu’on la vus, blessées, un air absent palissant son visage. Ainsi donc elle était sa prochaine marionnette favorite. Ce fut aussi à cet instant que l’on se rendit compte de la force cachée de ma sœur. Bien que nous fûmes tous révolté qu’il ose s’en prendre à l’un de nous nous gardâmes notre colère pour nous, Elya se dit suffisamment forte pour le supporter, sachant très bien qu’elle aurait l’occasion de se venger un jour, nous restâmes donc chacun impassibles, froids comme à notre habitude, nous contentant de soutenir du regard Elya lorsque nous la croisions, elle nous savait là pour elle, mais elle savait aussi ne pas vouloir faire preuve de la moindre faiblesse, préférant encore subir les pulsions perverses de son père plutôt que de se plaindre ou de laisser échapper une larme. Enna avait déjà connu cela avec son propre père, elle lui apportait donc plus de conseils et de soutien que Seter et moi pouvions le faire. Nous contentant de garder au fond de nous notre haine pour nos pères, outrés qu’ils osent s’en prendre à nos précieuses, nous promettant d’un échange de regard de mettre nous-même fin à leur jour en temps venu.

Les années passèrent donc de nouveau, continuant d’évoluer sous l’apprentissage de nos pères, fomentant nos projets dans le plus pur des secrets. Enseignant à nos sœurs tout en renfermant notre rage de les voir ainsi abîmées par nos pères, non pas pour ce qu’elles subissaient mais plutôt par crainte qu’elles ne perdent courage et finissent aussi faible que l’avait été notre mère, nous forçant alors dans ce cas à les abandonner. Mais ne jamais douter de la force des femmes, elles se révélèrent bien plus puissantes que nous l’escomptions, notamment Enna qui prenait cela avec un détachement sans pareil, comportement que tentait au mieux d’adopter ma chère sœur. Malheureusement le destin ne fut pas si enclin à son égard…

C’est à mes quatorze ans qu’Enna devint officiellement mon épouse. Notre père aurait désiré que cela se fasse d’autant plus tôt mais la mort de notre mère l’en avait empêché. La relation que j’entretenais avec Enna ne fut en rien affectée par ce changement, certes nous devions partager une certaine intimité mais il n’empêchait que notre respect que nous éprouvions l’un pour l’autre n’en fut en aucun cas affecté. Il en fut même d’autant plus respecté, comme par ce mariage je la sauvais des griffes et des coups de son père, lui faisant bien comprendre que j’étais voué à plus que lui et que s’il osait toucher à une seule partie du corps de mon épouse alors il le regretterait, qu’il soit ou non le bras droit de mon père il n’était rien à mes yeux. Il se rendit alors compte qu’il n’était rien non plus aux yeux de mon père comme ce dernier fut plutôt satisfait des menaces froides que j’émis à l’égard du père de mon épouse. Enna était donc sauvée de son père, mais il n’empêchait que je n’avais, que nous n’avions, toujours pas l’influence suffisante pour secourir ma sœur… Mais elle faisait chaque jour preuve d’une force de caractère de plus en plus conséquente, nous faisant implicitement comprendre qu’il ne fallait pas que l’on s’inquiète pour elle mais que l’on continu afin d’atteindre plus rapidement notre but et décimer notre père comme il se doit.

Passant quelques peu plus de temps avec Enna on projetait ensemble des plans d’avenir bien plus construits, dépassant l’entendement, hors du commun pour le futur de la cité mais aussi de ses alentours qui ne semblaient pas intéresser mon père et qui a nos yeux représentaient bien plus. Nous nous moquions bien du peuple qui n’était rien pour nous, ce qui nous intéressait était notre force armée, lui donner plus d’importance et la faire évoluer à travers les territoires pour prouver de sa puissance à travers les terres.

Mon père sentait que nous complotions tous quatre bien des choses, il n’était pas aveugle aux liens que nous entretenions tous quatre et donc se méfiait beaucoup de nous, mais aussi se défoulait d’autant plus sur Elya. Malgré tout, il tentait de me faire revenir sur le droit chemin, sur son chemin, me donnant un peu plus de responsabilité, me demandant d’assister à certains de ses conseils.  Je lui fis alors part d’une de mes observations, le peuple que nous méprisions tant, auquel nous apportions que très peu d’intérêt mais que comparé à lui nous n’oublions pas, ce peuple qui en avait assez des mesures draconiennes émises par mon père, ce peuple qui mourait toujours un peu plus, succombant à la terreur. Ce peuple faible mais pas moins nombreux s’organisait dans l’ombre. Il suffisait de regarder là où il le faut, de payer les personnes adéquates pour le savoir. Au départ, j’en avais fait part à mes proches, Elya, Enna et Seter, nous demandant si nous n’allions pas laissé faire pour prendre le pouvoir, et tuer par la même nos pères, mais nous avions fini par nous mettre d’accord sur le fait qu’il était encore trop tôt, décidant donc d’en faire part à notre père. Lorsque je le fis celui-ci accueillit ma nouvelle d’un rire débile et exagéré.  Insinuant que ma crainte était infondée et puérile. Je m’attendais à cette réaction, après tout il se méfiait de moi et de la puissance que je gagnais avec les années, alors tant qu’il pouvait me donner tort pourquoi s’en prierait-il ? Je le laissais donc faire, me contentant de lui dire que je l’avais prévenu. Je laissais malgré tout mon contact dans la populace laissait traîner la rumeur que le conseil savait pour retarder leur attaque. Cette petite manigance fonctionna à merveille, ils retardèrent en effet leur attaque, pensant gagner en puissance alors que je savais parfaitement qu’ils n’étaient pas de taille face aux soldats d’élites qu’avait formés notre père.

Ce fut à mes seize ans que l’attaque eut lieu. La populace armée de ces outils débiles qu’ils avaient en leur possession ou encore d’armes dérobées aux soldats, voir forgées de leur main. Quoiqu’il en soit ils attaquèrent le palais, prenant par surprise mon père qui fut outré de cette attaque. Sa réponse fut très violente. Mais ce que nous n’avions pas prévu c’est qu’il me tienne pour responsable. Il craignait tant mon assurance et ma montée en puissance, de même que celle de Seter et aussi à son plus grand effroi celle d’Enna et d’Elya, qu’il finit par sombrer dans la folie de l’inquiétude. Me tenant pour responsable de ce coup d’Etat il me menaça, alors que la bataille aux portes du palais rugissait il s’en prit à moi, malheureusement pour lui, Seter et moi avions reçu le même entraînement que ses soldats d’élite, sachant que cela nous serait utile dans notre conquête du pouvoir. Mais cela nous permit surtout de mettre à mal nos pères. Notre oncle fut le premier à perdre la tête, au sens propre du terme. Le voir perdre la vie ne nous arrêta en rien, notre père quant à lui fuit avant de prendre en otage Elya. Il pensait que cela allait nous arrêter. Il eut bien tort.

Bien que nous tenions énormément les uns aux autres, nous étions prêts à mourir pour les autres, nous promettant de ne pas être affectés par cette mort comme celle-ci permettrait avant tout d’accéder à ce que l’on désirait le plus, la liberté et la puissance. Il suffit d’un signe de tête d’Elya pour que je lui lance ma lame, nous savions très bien que cela marquerait sa mort. Alors que ma sœur réceptionnait la lame dans sa paume, la colère et la haine de mon père éclata et il enfonça la sienne dans le ventre de ma chère sœur. Nous la vîmes tressaillir un instant, mais elle avait toujours été forte, dans un dernier effort elle se retourna pour faire face à notre père et lui trancher la gorge, l’étonnement figé sur son visage suant et marqué par la haine. Ainsi nos deux pères n’étaient plus. Alors que les soldats en finissaient avec les quelques rebelles, nous étions tous trois autour d’Elya, l’accompagnant dans ses derniers instants, ne laissant pas la place aux larmes ou au chagrin, la remerciant plutôt de ce qu’elle venait de faire, elle nous fit promettre de faire honneur à sa mort en nous élevant plus haut que tous, en restant ensemble, plus unis que jamais, plus fort que quiconque, n’aspirant qu’à nos buts et à notre force. Elle rendit son dernier soupir avec un sourire soulagé et heureux. Nous restâmes un instant à ses côtés avant d’emmener son corps loin de ceux des précédents leaders. L’enterrant comme une reine, ce qu’elle aurait été, comme la puissante qu’elle avait toujours été à nos yeux, comme celle qui nous avait permis d’acquérir le contrôle de la cité, de nous venger de nos pères.

L’avantage de ce soulèvement d’inférieur fut que Seter, Enna et moi-même pûmes accéder au pouvoir et obtenir le contrôle des différentes forces que cela impliquait. Le seul inconvénient fut bien sûr la mort de ma sœur Elya, mais nous nous en remîmes rapidement, aussi bien pour elle que pour ne pas perdre de vue le but que nous poursuivions depuis petits. Nous n’avions désormais plus aucunes limites. Ce soulèvement marqua donc le début de notre règne. Enna, Seter et moi-même au pouvoir de cette cité… Les projets à son attention ne manquant pas.

Notre première décisions fut d’accorder au conseil la corvée de gérer le peuple, il nous importait que très peu, nous trois préférions nous consacrer aux combats et à la recherche de puissance. Bien que le conseil soit au départ bien réticent quant à notre venue au sommet il changea bien rapidement de point de vue. Certes nous étions jeunes, mais notre maturité ne laissait en rien à désirer de même que notre comportement et nos prises de décisions. Nous ne nous laissions pas marché sur les pieds au regret de bon nombre qui pensait que la cité serait affaiblit par la perte de leur seigneur. Le peuple comprit bien rapidement qu’il ne faudrait pas compter sur un second coup d’état, nous les manipulions, nous les manipulions tous autant les uns que les autres. Le conseil, notre armée, l’élite, les aristocrates, la populace, nous avions des projets et des idées pour chacun d’eux pour parvenir à ce que l’on désirait.

Notre ordonnâmes au conseil de donner quelque peu plus de liberté à nos sujets, non pas parce que nous éprouvions un quelconque intérêt en eux mais pour ne pas les pousser à un autre coup d’état qui ne serait que perte de temps. Mais aussi pour les motiver à rejoindre nos rangs, et notamment notre armée élitaire que nous souhaitions plus conséquente. Cela se fit rapidement grâce à ces mêmes prises de décisions. Nous nous savions craint mais les bernions par le biais d’une certaine bienveillance, ils tombèrent tous dans la supercherie à notre plus grand contentement. Notre armée s’agrandit donc, se faisant plus forte sous notre poigne dure et sans merci.

Alors que notre père ne prêtait guère attention aux conflits et aux territoires l’entourant nous en fîmes autrement. Et de nouveau contrairement à mon père, nous étions présents lors des batailles, des guerres pour de nouveaux territoires. Ce qui nous importait n’était pas les terres en elles-mêmes mais plutôt rendre compte de notre force, étendre la crainte de nos voisins à notre égard. Très souvent deux de nous partions à la tête de ses armées, nous battant nous aussi aux côtés de nos soldats, ne nous cachant pas sous des tentes à attendre patiemment que le conflit donne lieu à un résultat, sachant que cela motiverait d’autant plus nos troupes. Ce qui en surprit plus d’un, en outrant par la même occasion, fut le rôle que je donnais à Enna. Je l’ai toujours respecté et traité en égale, bien conscient de sa force et puissance, si bien que lorsque Seter et moi-même partions à la tête de nos armées en vue d’un conflit nous lui laissions les reines de la cité, la dirigeant de la même main de fer que la mienne. Mais ce qui sortait d’autant plus de l’ordinaire était les fois où elle m’accompagnait aux combats, Seter, mon fidèle bras droit, régnant de la même manière que nous autre, Enna combattant elle-aussi, une véritable amazone, fière de prouver ce dont elle est capable, se plaisant à ôter le sourire moqueur de nos opposants. Nos surprenions mais nous en moquions grandement, nous gagnions en puissance, en influence et cela était ce qui nous plaisait le plus.

Les années passèrent ainsi pendant plus d’une décennie. Nous devînmes intouchables, renforçant notre pouvoir, notre influence de même que notre cruauté et notre dédain à l’attention des faibles. Nous forgeant une réputation parmi nos voisins et plus loin que nous l’escomptions par le biais de nos manières de régner et de nous développer. Nous plaisant dans ce que nous faisions, appréciant être ceux imposant les limites sans y percevoir les inconvénients, manipulant à souhait autrui, nous amusant du monde qui nous entoure.

Malheureusement plus les années passées et plus nous étions rongés par l’ennui. A notre grand mécontentement nous fîmes face à une nouvelle limite liée aux conditions de l’époque, nous n’avions pas la possibilité de voir aussi loin que nous le désirions et cela avait l’art de nous désappointer plus que nous le redoutions. Nous voulions toujours voir plus loin, mais avions à notre charge une cité débile et nombre de piètres êtres sous notre commandement. Nous nous moquions d’être à la tête de cette cité, tout ce que nous voulions était notre évolution personnelle, seuls nous trois comptaient voilà tout. Nous nous moquions de notre statut de leader, simple mot qui n’avait que très peu d’intérêt à nos yeux.

De plus nos années passaient, nous n’avions en aucun cas envie de reléguer la réputation que nous nous étions faites à qui que ce soit, sachant que personne n’en serait plus digne que nous trois. Nous voulions partir à la conquête de monde, tous trois, seuls, montrant notre force sans compter sur qui que ce soit d’autres. Oui, nous voulions nous débarrasser de cette cité qui nous limitait dans nos projets… Cette limite allait bien rapidement disparaître grâce à un inconnu de passage dans notre cité, cet inconnu qui fut l’un des rares à avoir le droit à notre respect et reconnaissance. Un puissant comme nous n’en n’avions encore jamais vu…

Cet homme vint se présenter à nous, n’éprouvant guère de difficultés pour se frayer un chemin jusqu’à notre demeure puis jusqu’à nous. De suite nous ne doutâmes guère de sa puissance, elle émanait tant de lui qu’il aurait été bien niais de chercher à la nier. C’est pour cela que nous acceptâmes de lui prêter audience et d’écouter ce qu’il avait à nous dire. Ou plutôt à nous proposer.

Cet homme se disait venir du Nord, un roumain du nom de Dacian, nous n’en avions que peu entendu parler mais la puissance de son nom ne nous était pas étrangère de même que le mystère qui régnait autour de leur prise de pouvoir. Il nous en apprit plus sur lui, ce qu’il était réellement, nous ne le crûmes pas de suite même si tout en lui et notamment son regard rougeoyant et assoiffé nous imposait le doute. Notre doute fut de courte durée lorsqu’il se nourrit de l’un de nos serviteurs et mit à mal sans aucune difficulté l’un de nos soldats d’élite. C’est ainsi que l’on apprit pour l’existence des êtres de la nuit, pour les vampires. Nous n’éprouvâmes pas de craintes, après tout s’il avait désiré nous menacer ou nous tuer il l’aurait très certainement fait depuis longtemps. Nous étions plutôt envieux, après tout, ces êtres avaient tout à envier, leur vie d’éternité, leur force et leurs sens décuplés, leur intelligence …  Oui il y avait beaucoup chez eux que nous avions longtemps rêvés sans pour autant croire cela possible.

Sa venue était donc pour nous une révélation. Il nous fallait devenir tel que lui pour acquérir ce que nous avions toujours désiré. Et il était là pour nous l’offrir sur un plateau… L’immortalité. Cet homme, si l’on pouvait le décrire ainsi, avait eu vent de nos faits et nos conquêtes, de notre désir de voir toujours plus loin et haut. Il avait apprécié notre désir de puissance et notre dédain pour les faibles. Il venait en ce jour nous proposer de devenir des vampires à notre tour, de faire partir de son clan, les Dacian. Lorsqu’il nous dit nous rattacher à son clan le doute nous prit de nouveau. Nous avions toujours rejeté l’influence d’autrui et les limites, même si nous acquérions l’immortalité à quoi nous servirait-elle si c’était pour prêter allégeance à son clan ? Nous lui demandâmes de nous laisser une nuit de réflexion ce qu’il fit.

Nous passâmes le reste de la soirée et de la nuit à discuter tout trois. Seter, Enna et moi. Faisant l’étalage des avantages et inconvénients que pouvaient présenter sa proposition. Bien sûr, les avantages prenaient rapidement le dessus comme cela nous permettait d’obtenir ce dont on avait toujours rêvé et de jouir d’une toute nouvelle liberté. Mais il restait quelques inconvénients comme faire partir de ce clan. Cet inconvénient passa rapidement sous silence, chacun d’entre nous savait que l’on allait sûrement avoir dû mal à s’y faire mais qu’avec les années nous pourrions nous habituer sachant qu’il ne nous empêcherait en rien de faire ce que l’on avait toujours désiré. Nous élever. Puis nous savions bien que l’on pouvait patienter et trouver un autre vampire pour cette transformation mais il nous avait fait part d’un autre clan qui se pensait supérieur aux autres, les Volturi, ceux désirant se fondre dans la masse et empêcher à ces êtres supérieurs de traiter comme il se doit les pauvres humains que nous sommes. Nous préférions tous être transformé par un puissant quitte à lui prêter allégeance plutôt que d’avoir affaire à des êtres qui se voilent ainsi la face et à la vision si limitée…

Nous acceptâmes donc sa proposition, non sans avoir un horrible projet pour cette cité et cette armée que nous avions forgées à notre effigie. Une simple morsure, la douleur, la brûlure, l’atroce souffrance que tout cela engendra, nous accueillîmes tout cela les bras ouverts sachant que ça ne serait qu’infime face à ce qu’on allait pouvoir faire par la suite. Nous nous redressâmes tout droit, les yeux rouges sang similaires à ceux de celui qui nous avait offert ce présent, un sourire mauvais sur les lèvres. Désormais plus rien ne pouvait nous arrêter. Il nous aurait été possible de quitter notre cité en secret et la laisser livrée à elle-même mais nous avions tant travaillé, donné pour en faire ce qu’elle était à ce jour que nous ne pouvions nous résigner à laisser quelqu’un d’autre obtenir ses avantages.

Nos mesures ont très certainement étaient considérées comme exagérées et terribles mais c’est ce que nous sommes, et notre faim à l’instant était bien trop grande pour nous en empêcher. Nous décimâmes nous-même notre fameuse armée, mettant fin à son existence ainsi qu’à une grande partie de notre peuple, ne laissant que quelques misérables qui sombrèrent bien rapidement dans la folie à la suite de ce qu’ils avaient vu, suffisamment rassasiés pour ne pas mettre fin à leur existence. Le carnage dura bien une journée nous rendant ainsi compte de nos nouvelles capacités et les appréciant plus que jamais. Le soir nous quittâmes notre cité n’étant désormais plus que ruines, flammes, cendres et fumées noires se propageant dans la nuit au rythme des quelques cris des agonisants ou des fuyards. Suivant le Dacian nous partîmes alors de Grèce pour nous diriger au Nord sur des territoires que nous n’avions toujours pas eu l’occasion de découvrir et qui aujourd’hui ne nous étaient plus inaccessibles…

Nous apprécions le tempérament et les projets d’avenir que possédaient les deux leaders du clan des Dacian, n’éprouvant donc aucunes difficultés au cours de nos premières années d’existence à nous soumettre à leurs requêtes et à les aider dans leur conflit avec l’autre clan de vampire italien. Nous étions toujours tous trois ensembles, nous sachant plus puissant ainsi et par la même plus barbares. Nous nous amusions donc plus. Car c’était le cas, notre nouvelle nature nous permit d’ajouter du ludique à notre existence, un ludique certes sombre et sanglant mais tellement jouissif. Nous ne pouvions nous passer de plus de combats, de conquêtes, de manigances…

C’est alors qu’avec les deux Dacian nous vint l’idée de former un sous clan disons élitaire mais avant tout secret. En effet, ils en vinrent à m’en faire part, Seter, Enna et moi étions tous trois très solitaires, nous détachant énormément du reste du clan, en faisant surtout selon notre bon vouloir et en fonction de nos idéaux, mais nous étions surtout très puissants, nos pouvoirs hors du communs nous permettant d’acquérir toujours plus de puissance. Nous n’en étions pas moins loyaux aux deux Dacian mais aimions aussi suivre notre propre route refusant de trop nous intégrer au reste du clan, jouant souvent de mon don pour nous faire oublier. J’aurais pu l’user de même sur les deux Dacian mais comme dit précédemment nous étions loyaux et surtout nous leur étions redevables pour l’immortalité qu’ils nous avaient permis d’acquérir, je ne voyais donc pas d’intérêt à nous faire oublier d’eux. D’autant plus que cette loyauté à leur égard allait être récompensée.

Ils vinrent à ma rencontre pour discuter donc de ce sous clan, un groupe qui serait à l’instant composé de nous trois, Seter, Enna et moi-même, un clan de vampires qui prêterait allégeance aux Dacian mais qui serait surtout secret. Secret qui serait entretenu par mon don me donnant la possibilité de manipuler les souvenirs et la mémoire d'autrui. Don qui fit que je fus nommé à la tête de ce clan bien que je ne comptais en rien être un leader, tout ce qui m’intéressait dans cette idée était le fait que l’on acquiert ainsi le droit à la liberté que l’on désirait, voyager comme bon nous semble, tuant et asservissant selon nos désirs tout en rendant des comptes aux deux Dacian et leur prêtant main forte lorsqu’ils en éprouveraient le besoin. Je n’y voyais que des avantages et il en fut de même pour Enna et Seter.

J’acceptais donc et effaça de la mémoire des vampires ayant croisé notre route toutes traces de notre existence, hormis bien sûr Stefan et Vladimir. Nous quittâmes donc tout trois le château de Dacia pouvant désormais apprécier notre nouvelle liberté et découvrir le monde selon nos désirs et envies. Formant à nous trois ce sous clan, à la recherche de recrues se détachant du reste, aux dons exceptionnels, pour nous rejoindre dans le secret. C’est ainsi que le clan Zarkyän vu le jour.

Nous ne sommes que rumeurs et légendes. Voilà tant de siècles que nous parcourront la terre entière, menant à bien quelques missions pour les Dacian, nous débarrassant des piètres êtres qui ne méritent pas l’éternité ou qui souhaitent mettre à mal les desseins de notre clan. Nous ne sommes que quatre. Oui, au cours de notre épopée à travers les différentes terres du monde notre chemin à croiser le chemin d’une vampire méritant notre attention, du moins qui attirait beaucoup celle de Seter, sa promise, une russe du nom de Nadia. Le simple fait qu’elle plaise à Seter suffisait à nous faire penser qu’elle était apte à nous rejoindre mais nous en fûmes d’autant plus sûrs à la découverte de son don et de sa manière d’être. Elle était aussi froide et impartiale que nous. Elle rejoint donc les Zarkyän et c’est ensemble que nous avons continué notre avancée.

J’usais de mon don pour maintenir notre secret ou plutôt intensifier le mystère qui trônait autour de notre existence, donnant lieux à des légendes, certains pensaient que nous n’étions qu’un mythe, d’autres que nous existions réellement, ou encore que nous étions morts lors d’une des guerres opposant Dacian et Volturi. Nous nous amusions grandement de tout cela. Il nous arrivait par moment à retourner à Dacia, une première fois pour présenter notre nouvelle recrue, Nadia, quelques années après Jésus Christ, puis après quelques années ou siècles pour faire part d’informations importantes ou de faits pouvant intéresser Vladimir et Stefan ou encore pour faire de simple bilan de notre avancé et de la leur, repartant avec de nouvelles missions ou de nouvelles têtes à détacher de divers corps.

Nous avons bien sûr eu vent de la récente opposition entre les Dacian et les Volturi, les premiers apportant un soi-disant soutien à un petit clan de végétarien recherchant en réalité le conflit avec les italiens. Nous sommes venu assister en secret à la confrontation, plus par curiosité que par véritable intérêt et fûmes bien déçus de ne pas voir de véritables batailles, sachant que nous n’étions pas les seuls déçus mais qu’il en était de même pour les deux Dacian. Suite à cette frustration nous nous en sommes un peu plus pris au Volturi sans pour autant rester discret, nous renseignant sur eux et leurs soi-disant forces ou points forts… Puis nous continuâmes notre découverte du continent américain sur lequel nous n’avions pas mis les pieds depuis plusieurs décennies et qui avait bien changé depuis. Nous ne fûmes donc pas présents lorsqu’un vampire du nom d’Heinrich se décida à détrôner les deux leaders auxquels nous avions prêté allégeance. Nous l’apprîmes quelques temps après mais ne rentrâmes pas pour autant connaissant très bien les deux Dacian pour savoir qu’ils parviendraient à se sortir de cette situation par leurs propres moyens ou trouveraient toujours moyens de nous contacter s’ils nécessitaient réellement notre aide, à moins que nous décidions de venir par nous-mêmes leur prêter main forte si nous n’avions pas de missions primordiales à mener à bien.